L’organisme de formation seul ne peut pas assumer le résultat ni la mesure des effets d’une formation.

Le stagiaire comme le commanditaire (en particulier sa hiérarchie) sont co-responsables de la performance de l’action qu’ils ont choisie.

La réforme de 2014 et son décret qualité du 30 juin 2015 ont renforcé les exigences réglementaires pour les organismes de formation – celle qui s’annonce pour 2018 risque d’alourdir encore les contraintes, en particulier sur l’argument d’un affichage de la performance.

Les milliards de la Formation Professionnelle sont-ils une gabegie comme certains le dénoncent ? La réalité est évidemment plus nuancée, même si les lacunes sont bien réelles en matière d’efficience : pour un euro investi dans la formation, combien peut-on espérer de gain pour l’entreprise ?

Performance des formations : de quoi parle-t-on ?

L’évaluation de la formation à chaud (questionnaire de satisfaction) donne très peu d’information sur cette question.

C’est une fois qu’on aura procédé à l’évaluation des acquis de la formation par le stagiaire que l’approcheperformance_coresponsabilité deviendra vraiment intéressante au travers de trois registres d’observations :

  • Le transfert de l’apprentissage en situation de travail, la traduction en termes de pratique et de comportement au sein de l’entreprise
  • Les effets de la formation pour le stagiaire, sa posture professionnelle, sa place dans l’entreprise, sa reconnaissance et son épanouissement professionnel
  • Les effets directs ou indirects pour l’entreprise, à court, moyen et long terme

On voit à l’évidence que sur ces trois terrains où les effets de la formation sont censés se faire sentir, à différents degrés et différentes échéances, le formateur n’est plus présent, sauf dans de rares (accompagnement in situ).

L’une des clefs de réussite est la compétence de conseil de l’OF.

L’organisme est partie prenante de l’analyse du besoin de formation et sa responsabilité est en particulier de traduire ce besoin en objectifs pédagogiques.

Idéalement il aura pu réaliser un positionnement sérieux des stagiaires avant la formation (ce que le commanditaire ne permet pas toujours).

Il pourra alors personnaliser le programme, le parcours ainsi que les modalités pédagogiques et d’évaluation : c’est à ce moment déterminant que les conditions préalables de réussite seront réunies. Par contre, si ces conditions sont nécessaires, elles ne sont pas suffisantes seules et dépendent pleinement des compétences de conseil de l’OF.

Le deuxième moment déterminant pour le succès de la formation sera bien entendu le face à face pédagogique. Dans ce cadre-là, il apparaît évident qu’un consultant-formateur qui a contribué à l’analyse du besoin et à l’ingénierie pédagogique sera bien plus pertinent lors de l’animation de la formation.

Nous ne parlerons pas ici des organismes qui missionnent un formateur qui n’a pas été associé à la préparation, et bien souvent recruté en sous-traitance…

L’organisme de formation perd la main sur la mesure de la performance.

Dans la contractualisation de la prestation, il y a deux moments où parfois le commanditaire est bien absent :

  • Lors de l’analyse du besoin de formation, là où le prestataire est dans sa posture de consultant… et où il a besoin d’un interlocuteur fiable…
  • A l’issue de la formation, pour s’assurer du transfert des acquis en situation de travail : même quand le commanditaire s’est intéressé au choix de la formation, il oublie d’en assurer un suivi sérieux, considérant qu’il a “fait sa part” en offrant ce stage à son salarié…

Le meilleur consultant-formateur du monde, avec des procédures bien appliquées de l’analyse du besoin à l’évaluation, ne pourra alors rien faire pour garantir la performance et la meilleure utilité de sa prestation pour le salarié et pour l’entreprise.

Et pourtant il a répondu parfaitement à l’esprit et à la lettre des dernières exigences sur la qualité de ses prestations…

La réforme annoncée pour début 2018 devra plus impliquer le commanditaire

Il est impératif que la responsabilité du commanditaire soit engagée avant et après la réalisation de l’action de formation et ce, sur deux points essentiels :

  • Avant la formation, il doit participer à l’analyse du besoin et le valider (critère n°1 qui incombe aujourd’hui à l’OF)
  • Après la formation, en fonction de la nature des « effets attendus », il devra en mesurer l’impact (critère n°5 qui incombe aujourd’hui à l’OF)

Nous savons bien, en tant que consultants-formateurs, que quand on a en face de nous un Manager de terrain impliqué auprès de son collaborateur dans le choix et le suivi de la formation, le résultat est toujours au rendez-vous.

Mais pour pouvoir mesurer l’impact d’une formation, il faut définir ce qu’on mesure et comment on le mesure…

Lorsqu’il s’agit de décrocher une certification, une habilitation professionnelle, la mesure est extrêmement simple.

Mais pour toutes les formations touchant à des compétences plus diffuses (management, communication, capacité d’innovation,…), cela peut devenir beaucoup plus complexe à appréhender. Il est alors impératif d’associer toutes les parties prenantes et en premier lieu le commanditaire.

  • Quels sont les effets attendus de la formation ?
  • Comment se déclinent ces effets pour le stagiaire, pour l’équipe, pour l’entreprise ?
  • Comment observera-t-on ces effets, avec quelles indicateurs mesurables ?
  • Est-on capable de donner une mesure de la situation actuelle qui nous permettra de comparer après ?

Si on réussit à répondre à ces questions, la mesure de la performance pourra alors être considérée un peu plus sérieusement.

Mais il serait aberrant de vouloir faire porter encore cette responsabilité aux seuls organismes de formation, grands ou petits !

Alors, commanditaires mais pas coupables ?

Il est temps de considérer les vraies responsabilités de certains gâchis en matière de dépenses de formation, notamment lorsque les commanditaires sont désengagés du processus de choix et de suivi des formations.

Même quand l’entreprise finance elle-même son plan de formation, elle n’a pas toujours conscience de l’argent qu’elle peut dilapider… et des bénéfices qu’elle aurait à tirer d’actions de formation accompagnées dans la durée et en profondeur.

Ce sont bien les commanditaires que l’on devra impliquer sur cette exigence de définition et de mesure de la performance de chaque formation.

Et que penser de l’idée d’accentuer l’individualisation des parcours et le choix par le seul salarié, qui conduira à désengager encore un peu plus l’entreprise de sa coresponsabilité ?

Si le souhait du gouvernement est bien de mettre en avant la notion de performance, il ne faudra pas que cette réforme de 2018 se trompe de cible.

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer